A la une Nappe d'algues sargasses à la dérive dans la mer des caraïbes

Warren DANIEL

BILAN 2025 des échouements de sargasses en Martinique

24/12/2025

L’année 2025 s’est distinguée en Martinique par une intensité exceptionnelle des échouements de sargasses. Les surfaces observées au large et à proximité de l’île ont atteint des niveaux remarquables, classant cette année 2025 au 1ᵉʳ rang des plus fortes superficies détectées depuis le début du suivi satellitaire opérationnel en 2011.
Cette activité soutenue s’est traduite par des échouements fréquents, parfois massifs, et par des volumes de collecte très supérieurs à la moyenne annuelle de la décennie. La combinaison d’une forte disponibilité de biomasse en amont et de conditions océano-météorologiques favorables a conduit à une pression inhabituelle sur le littoral martiniquais.

1. Chronologie et intensité des échouements en 2025

1.1. Mise en place précoce de la saison

L’année 2025 se singularise par une dynamique spatio-temporelle marquée dès la fin de l’année précédente. Les premières arrivées sur la façade atlantique martiniquaise sont signalées autour de 9 décembre 2024, avec des volumes encore modestes, mais inhabituels pour la saison. Puis les premiers épisodes significatifs dès mars 2025, en cohérence avec la fenêtre saisonnière habituelle d’advection des sargasses depuis l’Atlantique central. Ces échouements, bien que marqués, s’inscrivaient dans l’intervalle d’intensité observé lors des années récentes. Ce qui n’était en revanche pas habituel, ce sont les échouements constatés au nord caraïbe fin avril / début mai dû à des conditions de courant et de vent favorables à l’échouement des radeaux déjà présents dans la mer des Caraïbes.

L’évolution de la surface mensuelle observée depuis 2011 (fig. 1) met en évidence que 2025 présente plusieurs pics parmi les plus élevés de la série, avec une forte concentration temporelle des apports. Dans cette zone de surveillance, 2025 confirme une activité élevée et structurée, avec des conditions favorables à des échouements significatifs sur les côtes martiniquaises.

Figure 1: Evolution de la surface mensuelle des sargasses depuis 2011 dans la zone de surveillance à l'est de la Martinique

1.2. Un premier épisode majeur et persistant (mars-avril).

Entre mars et avril 2025, la Martinique est exposée à un des épisodes d’échouements continus les plus marquants de la décennie. Les cartes hebdomadaires de concentration montrent une extension progressive du corridor principal de sargasses, alimentée par la zone de production située dans le secteur Atlantique centre-ouest.

Durant cette période, l’ensemble de la côte atlantique est affectée. « Les volumes récoltés atteignent 4 500 tonnes pour la seule période avril-juin. Alors que l’année dernière, sur la même période, seulement 1 500 tonnes avait été récoltée » (Source : Mr Voyer. GIP).

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1.3. Intensification exceptionnelle à partir de juin

La bascule vers une situation exceptionnelle chargée a été observée à partir de juin 2025. Les images satellitaires OLCI révèlent une restructuration rapide du corridor de sargasses, avec l’apparition d’un vaste ensemble de radeaux denses entre 45°W et 55°W.

Les surfaces dérivantes suivies dans l’Atlantique ouest ont brusquement augmenté, positionnant 2025 comme l’année la plus contributive de la série 2011-2025 pour la Martinique. L’évolution des surfaces cumulées mensuelles (fig. 2) met en évidence une accélération très rapide du cumul entre mai et juillet, supérieure à celle observée lors des années de référence 2018 et 2021. À partir du mois d’août, la courbe tend vers un palier, traduisant une persistance des échouements, mais avec une dynamique d’intensification plus modérée.

Figure 2 : Courbe des surfaces cumulées par année

2. Comparaison interannuelle et anomalies

L’analyse des anomalies annuelles par rapport à la moyenne « climatologique » met en évidence une évolution structurante du régime d’échouement (fig. 3). La période 2011 – 217 apparaît globalement déficitaire. Une rupture nette est observée à partir de 2018, avec l’installation d’anomalies positives récurrentes. Le maintien d’un régime excédentaire récent, malgré une variabilité interannuelle.

Malgré une variabilité interannuelle marquée, le maintien d’un régime excédentaire caractérise la période récente. L’année 2025 présente une anomalie positive proche de celle du record de 2018, dépassant nettement les années déjà considérées comme actives (2021, 2023). Ce positionnement confirme que 2025 ne révèle pas d’une simple fluctuation, mais d’un événement exceptionnel au regard de la climatologie récente.

Figure 3 : Ecart surfacique annuel à la moyenne de référence (2011-2021)

3. Prévision des échouements et dynamique saisonnière

La saison des sargasses 2025 s’est installée plus rapidement que l’année précédente, et avec une intensité accrue. Le niveau de prévision d’échouement atteignent un niveau très fort en 2025 dès juin, jamais égalé en 2024. La saison 2025 s’est étendue sur environ 26 semaines, se concentrant entre la fin mars et mi-septembre. Malgré cette durée comparable aux saisons récentes, l’intensité des échouements s’est révélée nettement plus concentrée dans le temps, avec des arrivées massives sur une période réduite, marquant une rupture avec les schémas observés lors de la saison précédente. Les prévisions se sont globalement avérées cohérentes avec les observations réalisées au cours de l’année (fig. 4).

Figure 4 : Niveaux de prévisions des échouements de sargasses

4. Une fin de saison exceptionnellement tardive

Un élément notable de l’année 2025 réside dans la persistance des échouements en fin d’année. Des radeaux épars observés en novembre et décembre ont continué à échouer sur le littoral martiniquais, traduisant l’absence de véritable pause.

Par ailleurs, de nouveaux amas de sargasses conséquents sont observés dans l’Atlantique central en cette fin d’année, laissant présager un début de saison 2026 potentiellement précoce et intense.

Conclusion

L’année 2025 se distingue par une intensité exceptionnelle des échouements de sargasses observés au large de la Martinique. Les surfaces cumulées atteignent un niveau inédit sur la période 2011–2025, avec une phase d’accumulation particulièrement marquée entre les mois de mai et juillet. Cette dynamique rapide, supérieure à celles observées lors des années de référence 2018 et 2021, a fortement accru la pression sur le littoral.

L’analyse des anomalies par rapport à la moyenne 2011–2021 confirme le caractère hors norme de 2025, qui présente l’écart positif le plus élevé de la série. En zone B2, les surfaces mensuelles estimées révèlent des pics d’intensité élevés et concentrés dans le cœur de la saison, traduisant des arrivées massives et rapides de radeaux de sargasses.

Ces éléments attestent d’une année 2025 exceptionnellement active, tant par l’ampleur des échouements que par leur structuration temporelle, renforçant les enjeux opérationnels de prévision et de gestion côtière sur l’exercice.